Les océans sont aujourd’hui victimes de nombreux impacts environnementaux, incluant ceux liés à la pêche. Le changement climatique et la pollution marine conduisent à un dérèglement des océans dont la stabilité est pourtant essentielle au climat, à la biodiversité et à certains modes de vie sur Terre. Si le secteur de la pêche n’est pas directement rattaché au climat, il tire profit d’une biodiversité marine et de ses stocks pour exister. Ainsi, il est essentiel de se poser la question des impacts environnementaux de la pêche, sur les océans mais aussi sur nos sociétés plus ou moins dépendantes de ce secteur.

En pleine crise climatique et environnementale, la réduction de notre consommation de produits issus de la pêche semble indispensable au maintien de la biodiversité marine et au fait de ne pas aggraver les injustices sociales déjà à l’œuvre.

Pêche et impacts environnementaux

Pêche de capture, aquaculture et consommation de poisson

En croissance depuis de nombreuses années, la consommation de ressources halieutiques est actuellement issue pour moitié de la pêche et pour moitié de l’aquaculture.((https://www.fao.org/3/i5555f/i5555f.pdf))

Évolution de l’utilisation de poisson au fil des années au regard de l’évolution de la population mondiale1

La production de la pêche de capture étant relativement stable depuis la fin des années 1980, c’est à l’aquaculture que l’on doit la croissance continue et impressionnante de l’offre de poissons destinée à la consommation humaine.

Comparaison des différentes méthodes de production et de capture de poisson dans le monde ((https://www.fao.org/3/i5555f/i5555f.pdf))

Les impacts environnementaux de la pêche

Les effet néfastes sur l’environnement liés à la pêche et / ou à l’aquaculture sont divers et variés. Ils peuvent concerner le climat, la biodiversité, la pollution marine… Ils sont aussi rattachés à des questions socio-économiques pour les populations dépendantes de la pêche dans leur modèle alimentaire ou pour leur commerce.

La pêche a des impacts directs sur le climat qui est pourtant le garant de la stabilité des océans

Les impacts les plus évidents sont ceux liés au climat. En effet, la pêche et son commerce nécessitent des transports et moyens de captures souvent très éloignés du bateau à rames et de la simple canne à pêche. Ce système implique directement des émissions liées au carburant utilisé par les bateaux lors de leur déplacement et de leur fonctionnement. Par ailleurs, la biodiversité marine contribue à la stabilité climatique. Ainsi, la destruction de cette diversité par la pêche implique nécessairement des impacts sur le climat. Malgré ces éléments, il est difficile de comptabiliser l’ensemble des émissions de la pêche car elles sont très dépendantes de nombreux facteurs.

La localisation de la pêche et sa destination sont des éléments essentiels puisque le transport sera nécessairement très émetteur de gaz à effet de serre. La méthode de conservation du poisson pendant le trajet rentre aussi en compte. Elle peut nécessiter une congélation du poisson directement sur le bateau.((https://blutopia.org/peche-empreinte-carbone/)) L’impact de la conservation reste cependant moindre par rapport à celui lié au trajet.

La pêche a des impacts sur la biodiversité des océans car elle surexploite certaines espèces

Mais bien évidemment, et au-delà du climat, la pêche a des impacts sur la biodiversité marine. Naturellement, les espèces marines se régulent comme n’importe quelle espèce animale. Leur stabilité est assurée par leur milieu de vie que constituent les océans. Or, aujourd’hui, 1/3 des stocks de poissons sont exploités au-delà de la limite de durabilité biologique.((https://www.fao.org/3/ca0191fr/ca0191fr.pdf)) C’est évidemment l’humain qui est responsable de cet impact qui n’est pas sans conséquence sur la survie de certaines espèces.

La pêche a des impacts sur les fonds marins et le stockage du carbone dans les océans

La technique de pêche rentre aussi en compte puisque pour les méthodes les plus barbares, elle peut conduire à la destruction des fonds marins et à de très nombreuses captures non-désirées (qui finiront bien souvent tuées). Les fonds marins et les poissons (quand ils meurent dans l’océan) représentent pourtant des stocks de carbone importants.

L’aquaculture, un meilleur modèle pour réduire les impacts environnementaux de la pêche ?

Les débats autour de l’aquaculture montrent bien que cette solution n’est pas miraculeuse. L’accumulation de nutriments et d’effluents, l’impact sur les pêcheries sauvages alentour ou encore la dégradation de l’environnement due au site posent de nombreuses questions quant aux méfaits de l’aquaculture.((https://www.globalseafood.org/blog/what-is-the-environmental-impact-of-aquaculture/))

Il est clair que l’objectif premier de l’aquaculture n’est pas de garantir la préservation de l’environnement, mais bien de répondre à une demande de consommation croissante en ressources halieutiques. Si ce modèle est un luxe pour les pays développés, il est aussi et sera de plus en plus une nécessité pour certaines populations qui dépendent des ressources marines dans leur modèle alimentaire.

Les progrès de l’aquaculture ont permis quelques bénéfices environnementaux et sanitaires. En effet, les conditions d’élevage étant contrôlées, elle permettent largement de réduire les risques de contamination de poissons (adieu mercure et métaux lourds !). Pour certaines espèces, le ratio de conversion alimentaire entre nourriture apportée au poisson et poids de protéines final est meilleur en comparaison de nombreux élevages carnivores. De plus, l’alimentation des poissons nécessaire à l’aquaculture s’améliore en étant de plus en plus issue de déchets et en se végétalisant.((https://www.globalseafood.org/blog/what-is-the-environmental-impact-of-aquaculture/))

Pêche sauvage et aquaculture sont deux modèles complémentaires. Ils n’ont aujourd’hui pas les mêmes atouts ou les mêmes facteurs de stress environnementaux et sociaux. Il est essentiel de comprendre que quelle que soit la méthode de production, les ressources halieutiques suivent le cours de n’importe quelle ressource. Il est donc utopique de croire en une croissance illimitée de notre consommation “d’aliments bleus“. De même que croire que cette croissance se ferait sans contre-partie environnementale.((https://www.nature.com/articles/s41586-021-03889-2))

Fig. 2
Principaux facteurs de stress liés à l’aquaculture et aux pêches de capture((https://www.nature.com/articles/s41586-021-03889-2))

Un pêche durable et responsable, vraiment ?

Nos préoccupations environnementales actuelles pourraient nous laisser croire que la pêche est un domaine encadré et légiféré afin d’atteindre une forme de pêche durable. Mais (spoiler alert) : ce n’est pas le cas. Et ce phénomène est directement lié à notre consommation de ressources halieutiques. En effet, “depuis 1961, la croissance annuelle mondiale de la consommation de poisson est le double de la croissance démographique“.((https://www.fao.org/3/ca0191fr/ca0191fr.pdf))

Parallèlement et au-delà de la consommation, l’activité de pêche est source de gaspillage et de pertes. En effet, ces dernières constituent encore 27% du poisson débarqué.((https://www.fao.org/3/ca0191fr/ca0191fr.pdf)) Et ce en ne considérant que les activités de pêches déclarées et encadrées. Mais la pêche illicite, non déclarée et réglementée est aussi un point de lutte essentiel pour envisager une pêche plus durable. Elle représente près de 30% des captures annuelles totales.((https://www.ecomarres.com/downloads/IUU1.pdf))

Dans les années à venir, la production mondiale de ressources halieutiques devrait continuer de croître. Cette croissance sera principalement due à l’augmentation de la production aquacole pour répondre à la demande croissante de poisson. Une consommation qui devrait se concentrer principalement en Amérique latine, en Asie et en Océanie.((https://www.fao.org/3/ca0191fr/ca0191fr.pdf))

Production halieutique et aquacole mondiale, de 1990 à 2030. Un modèle de pêche durable pour répondre aux besoins de consommation de poisson ?

Changement climatique, actions individuelles et consommations issues de la pêche

Toutes nos luttes pour limiter le changement climatique en cours et préserver la biodiversité sont urgentes et essentielles. De nombreuses actions sont très impactantes. Pour en prendre connaissance et conscience, une simulation d’empreinte carbone individuelle est souvent efficace. Nos actions fortes concernent particulièrement les domaines de l’alimentation, du transport et du logement. Si ces deux derniers ne sont pas directement en lien avec les océans et le domaine de la pêche, le premier y est rattaché. Ainsi, il est possible d’envisager quelques orientations pour limiter notre impact environnemental lié à notre consommation de ressources aquatiques.

Il est évident que certaines actions qui n’ont rien à voir avec les océans sont bien plus efficaces que le dilemme entre des crevettes roses d’Amérique Latine et des gambas BIO de Madagascar. En effet, le fait de ne pas prendre l’avion pour se faire un week-end à New-York sera bien plus pertinent. Là encore une simulation d’empreinte carbone permet de prendre conscience des ordres de grandeur et d’agir avec cohérence.

Enfin, notre impact sur les océans ne s’exprime pas uniquement lorsque nous consommons des produits issus de la mer. Pour comprendre nos impacts sur les océans, pourquoi ne pas participer à une Fresque Océane ou bien (re)lire cet article ?

La meilleure des solutions pour réduire ses impacts liés à la pêche : consommer moins de poisson

La consommation mondiale de poisson par habitant est passée de 9 kg en 1961 à 20,2 kg en 2015. Cela correspond à une augmentation moyenne d’environ 1,5% / an.((https://www.fao.org/3/ca0191fr/ca0191fr.pdf)) Tout comme la viande, notre modèle alimentaire a évolué vers une forte consommation de produits aquatiques. C’est ainsi qu’en 2018, les français ont consommé en moyenne 24 kg de poissons (33,5 kg de produits aquatiques au total).((https://www.franceagrimer.fr/content/download/67093/document/STA_MER_CONSO_2020.pdf))

Or, cette consommation a des impacts environnementaux non négligeables. Comme pour la viande, il est nécessaire que nous réduisions notre consommation de ressources halieutiques. C’est un levier d’action fort et nécessaire pour réduire notre impact environnemental. Et comme toute consommation, certains produits aquatiques ont plus ou moins d’impacts.

Émissions de GES par kg de produits aquatiques (sans prise en compte du transport) sur le blog de Bon Pote((https://bonpote.com/les-infographies-bon-pote/))

A l’image de l’avion ou d’autres exemples, notre consommation de produits aquatiques est le reflet d’une certaine injustice sociale. Notre modèle de consommation a des impacts planétaires qui auront eux des répercussions sur les populations les plus vulnérables. D’autant plus qu’il est nécessaire de garantir une certaine production de poissons vitale à certaines populations.

Un modèle de pêche durable est donc avant tout un modèle alimentaire où nous, européens, devons consommer beaucoup moins de produits aquatiques.

La difficile bataille des labels de pêche durable

BIO ou pêche durable, même combat ! Difficile de s’y retrouver parmi tous les labels qui existent ! Lesquels sont réellement fiables ? Tout dépend du degré de durabilité appliqué et des exigences que nous avons. L’association BLOOM a par exemple largement mis en lumière les limites du label MSC qui se prétend durable((https://bloomassociation.org/dev/wp-content/uploads/2020/08/imposture-label-msc.pdf)). Tout comme le BIO, ce qui est essentiel à retenir c’est qu’aucune pêche ne sera durable si nous ne changeons pas notre modèle alimentaire et que nous continuons de consommer autant de poissons.

Quelques modèles ou recommandations à suivre

Privilégier une pêche locale et respectueuse des océans

Le choix d’une pêche de proximité et respectueuse de son environnement sera primordial pour limiter l’impact de notre consommation. Ainsi, s’orienter vers une pêche locale (ce qui concerne donc ceux qui vivent près de la mer) sera un choix judicieux. Mais il faudra par ailleurs veiller à ce que les méthodes de pêche ne soient pas barbares. Oublions donc les chaluts de fond qui raclent les sols et détruisent les écosystèmes marins ! Privilégions à l’inverse une pêche de ligne, qui minimise l’impact sur le milieu et qui limite les prises non-désirées.

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Privilégier des espèces qui ne sont pas menacées selon leur rythme biologique

Et oui parce que même pour le poisson il y a des saisons ! Enfin ou plutôt des rythmes biologiques quant aux périodes de reproduction qui doivent être respectés. Associé à une consommation raisonnée, cela évitera de remettre en cause la durabilité biologique de ces espèces. Et par ailleurs, le choix des espèces est primordial afin d’éviter de consommer des espèces déjà menacées. N’hésitez pas à utiliser à l’application Ethiquettable pour en savoir plus sur l’état des stocks de poissons.

Fish4ever & Le Phare d’Eckmühl

Et s’il ne s’agit pas de poissons frais, comment choisir ?

Fish4ever est sans doute l’un des modèles les plus aboutis en terme de pêche “durable” (on est d’accord que ça n’existe pas) et de modèle humain. Thon, sardines, maquereaux, anchois et saumon toujours sauvages et pêchés pendant les bonnes saisons en fonction des reproductions. Les poissons sont travaillés entiers et agrémentés de produits certifiés BIO. Un produit exceptionnel : le seul thon albacore certifié commerce équitable.

Le Phare d’Eckmühl est aussi un exemple très louable. Du thon, des maquereaux, des sardines, du foie de morue, de la truite, du saumon… Des produits d’une grande qualité issus de la pêche sauvage ou de la pisciculture. Une entreprise locale aux valeurs humaines engagées.

Ces deux modèles proposent d’excellents produits qui défendent autant que possible une pêche plus durable. Le seul bémol resterait leur prix. Mais on ne peut pas combiner valeurs environnementales, éthiques, qualité et vendre du poisson à 5 euros le kilo !

Végétaliser son alimentation marine ?

Tout comme l’alimentation terrestre qu’il est essentiel de végétaliser, pourquoi ne pas suivre la même piste concernant l’alimentation marine ? Et oui les algues ont de nombreuses vertus gustatives et nutritives ! Elles permettent notamment de retrouver certaines saveurs marines sans contribuer à réduire les stocks de poissons.

Il est aujourd’hui essentiel et urgent de réduire nos impacts sur les océans et plus généralement nos impacts environnementaux. Nos choix alimentaires sont loin d’être anodins et ont de réels impacts sur le réchauffement climatique et la biodiversité. Réduisons notre consommation de ressources halieutiques et réfléchissons-la afin de réduire nos impacts environnementaux et humains. Mais la pêche n’est pas notre seule activité ayant des effets néfastes sur les océans. En effet, d’autres actions plus éloignées des océans ont pourtant de réels impacts. Qu’il s’agisse d’un vol en avion ou d’une surconsommation de plastiques, modifions nos habitudes afin de garantir la stabilité des océans.

A toi de jouer ! Maintenant que tu en sais plus, partage cet article à ceux qui ne savent pas encore ! 💚

  1. https://www.fao.org/3/i5555f/i5555f.pdf []

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